Droit à la réparation

Pourquoi l’indice iFixit diffère de l’indice de réparabilité français

Il s’avère que la publication de la traduction de cet article coïncide avec l’extension de l’indice de réparabilité français à quatre nouvelles catégories de produits le 4 novembre dernier. Donc, il est à présent également plus facile de prendre la réparabilité en compte lors d’un achat de lave-linge top (chargement par le dessus), lave-vaisselle, nettoyeur à haute pression ou aspirateur. La sphère d’influence de la réparabilité s’agrandit !

Orange store in France

Depuis plus d’un an, un indice de réparabilité est affiché en France dans les points de vente des produits de différentes catégories. Le but est de sensibiliser les consommateurs et consommatrices sur le coût réel des appareils neufs, pas seulement sur leur prix d’achat.

Ainsi, la loi française oblige Apple, Samsung, Microsoft et autres compagnies vendant smartphones, ordinateurs portables, lave-linges à hublot, tondeuses à gazon électriques et téléviseurs à calculer la réparabilité de leurs produits. En résulte un indice noté sur 10, affiché à côté du prix, quel que soit le canal de vente. C’est un immense progrès qui nous met aux anges, même si l’indice bleu-blanc-rouge et le nôtre diffèrent parfois. Permettez-nous d’expliquer pourquoi.

L’indice français prend en compte de nombreux facteurs de la durabilité d’un appareil. Le système se base sur cinq différentes catégories à coefficient égal : la documentation, le démontage, la disponibilité des pièces détachées, leurs prix et des facteurs spécifiques à chaque catégorie, par exemple les mises à jour et réinitialisations logicielles des téléphones. Les fabricants estiment leurs propres produits, à l’aide d’une feuille de calcul qui attribue un score total sur 10. Vous pouvez trouver un exemple pratique dans notre article sur les indices de réparabilité divergents de deux iPhone pourtant similaires.

Le Galaxy Note 20 sur un site de vente français, avec son indice de réparabilité affiché de façon bien visible.

Prenons un exemple pour concrétiser ! Le Samsung Galaxy Note 20 avait écopé de 3 points sur 10 sur notre échelle de réparabilité : nous avions apprécié les vis non propriétaires et les composants modulaires, mais détesté la bataille contre l’adhésif pour l’ouvrir et la douloureuse procédure de réparation batterie et écran. Mais les critères français lui attribuent un 8,1 sur 10. Une grande partie des bons points sont des choses que Samsung propose uniquement en Europe et non aux USA, comme des manuels de réparation à télécharger et des pièces détachées aux prix raisonnables et aux délais de livraison rapides. Le Samsung Galaxy Note 20 fait des étincelles alors que l’iPhone 12 est à la traîne, 2,1 points derrière lui.

Côté démontage, le Galaxy Note 20 écope d’un 7 et l’iPhone 12 d’un 5,9. Nous ne disposons pas de la note détaillée des deux téléphones, donc nous ne pouvons pas savoir la cause précise de cet écart. Mais le système français favorise les vis standard aux Pentalobe de la maison Apple. De même, il accorde plus d’importance au fait de pouvoir démonter les composants communs, y compris les caméras, avec le moins d’étapes possibles. Et quand on considère la note globale, 8 des 10 points du total ne concernent pas le démontage. Donc si un appareil est difficile à ouvrir, mais dispose par exemple d’un SAV solide, il peut profiter d’un indice relativement élevé. 

Samsung Galaxy Note 20 cameras, removed from two models
Retrait de la caméra Samsung Galaxy Note 20 plutôt modulaire lors de notre vue éclatée.

Est-ce que la différence entre notre indice et l’indice de réparabilité français nous préoccupe ? En bref, non. L’indice de réparabilité français profite à tout le monde. Samsung, qui mène le marché mondial des smartphones, publie des manuels de réparation complets en Europe, renforce la vente de pièces détachées et fera des pieds et des mains pour garder un indice compétitif. Samsung ne brille pas par ses initiatives écologiques – sauf dans l’Hexagone – serait-ce deux entreprises distinctes ?

iFixit note la réparabilité des appareils depuis plus d’une décennie – nous avons fait nos premiers pas avec l’iPhone 4 (version CDMA). À notre connaissance, c’était le premier indice de réparabilité au monde. Notre approche se concentre sur ce qui est à la portée des personnes peu expérimentées dans le domaine de la réparation téléphone, console, PC et autres. Nous achetons les mêmes exemplaires que les utilisateurs et utilisatrices, faisons de notre mieux pour les ouvrir sans abîmer leurs composants et partageons ensuite nos découvertes publiquement. Nous démontons les appareils en avant-première, afin que les adeptes de la réparation puissent apprendre de nos tentatives.  

Démontage du OnePlus Nord.

Il y a quelques recoupements avec le système français – iFixit a participé à son développement. Comme l’indice de réparabilité bleu-blanc-rouge, nous récompensons la disponibilité de manuels d’entretien et l’accessibilité des pièces fréquemment cassées ou vite usées, comme les écrans et les batteries. Mais l’écosystème français a pour but de développer une économie circulaire dans un sens plus large, sans influencer spécifiquement le design des appareils. Les deux indices peuvent porter la transition vers des produits plus vertueux et la réduction du flux d’e-déchets. 

Nous sommes ravis de voir une nation entière raisonner au-delà du prix. Nous surveillons également de près les entreprises qui pourraient être tentées de gonfler leurs indices de démontage et de documentation. Si vous tombez sur un indice qui ne cadre pas avec votre vision de la réalité, contactez-nous ! Voir les entreprises ambitionnant de se surpasser les unes et les autres quant à aider les gens à réparer leurs produits, c’est bien. Voir les gens partager cette ambition, c’est encore mieux !

En attendant, nous allons continuer à vous fournir les indices indépendants et experts qui vous tiennent tellement à cœur.

Cet article a été traduit par Claire Miesch.